L’explosion du port de Beyrouth, survenue le 4 août 2020, a marqué un tournant dans l’histoire du Liban, et de la capitale Beyrouth.  La Déclaration urbaine de Beyrouth a été lancée, le 10 août 2020, avec la participation de l’Ordre des Ingénieurs et Architectes de Beyrouth, en partenariat avec les facultés libanaises d’architecture, la Fondation Chadirji pour l’Architecture et la Société, l’Association des Architectes de Beyrouth, et l’Association des Urbanistes de Beyrouth.

Cette déclaration passe en revue un ensemble d’idées qui constitueraient un point de départ pour formuler une vision intégrée pour la reconstruction des zones endommagées par l’explosion du port. En outre, elle propose une vision nationale de la reconstruction, de la réhabilitation du patrimoine, de la protection du tissu social, de l’identité urbaine distincte dans la zone touchée, ainsi que de la reformulation de la relation portuaire et de son contexte urbain.

En effet, cette déclaration est un effort intellectuel et culturel qui contribue à la formulation d’une vision globale, sous forme d’idées et de propositions de réforme urbaine. Elle les présente comme un ensemble de questions documentées qui cherchent à relever les défis du vidage de la ville de ses résidents et du changement démographique, ainsi qu’à fournir des suggestions et des idées rapidement réalisables et opérationnelles aux fonctionnaires et institutions officielles concernées.

La Déclaration urbaine de Beyrouth définit le mode d’intervention et le rôle que le l’Ordre des Ingénieurs et Architectes de Beyrouth pourrait jouer en coopération avec les universités afin d’envisager la réforme de la zone endommagée. Elle adopte une vision globale des aspects sociaux, économiques et urbains, et considère la zone endommagée comme un tissu urbain pleinement intégré au port.

La Déclaration urbaine de Beyrouth met l’accent sur la préservation du tissu urbain patrimonial, composé de son propre tissu général, en prenant en considération le caractère patrimonial de la zone endommagée, déterminant les voies entre le court, le moyen et le long terme, et créant un observatoire. Par ailleurs, la déclaration se penche sur la nécessité d’établir des politiques appropriées et une gestion de la reconstruction, par la conception de mécanismes garantissant une large participation de la société et des parties concernées.

La Déclaration urbaine de Beyrouth se divise en cinq axes, à savoir :

1.           Histoire et identité de la ville ;

2.           Les conséquences socio-économiques ;

3.           Vers une vision globale de la réhabilitation de la zone endommagée ;

4.           Les défis de la protection et de la réhabilitation du tissu urbain patrimonial ;

5.           La gestion et l’organisation de la planification et de la reconstruction.

Proposition de recommandations :

• Développer une vision nationale de la reconstruction, la réhabilitation du patrimoine, la protection du tissu social et l’identité urbaine de la zone endommagée.
• Former un comité consultatif solidaire et impartial à l’initiative de la Direction générale des antiquités pour superviser les études, fournir des conseils professionnels, suivre la mise en œuvre des travaux d’urgence, et rationaliser et contrôler leur financement.
• Créer un organisme indépendant pour gérer et préserver le patrimoine urbain vivant, sous la supervision du ministère de la Culture. Objectifs : préserver les villes et monuments historiques, les zones au patrimoine local et traditionnel, ainsi que leur patrimoine matériel et immatériel, et l’urbanisme avec tous les éléments qui y sont associés.
• Établir les lois et règlements nécessaires pour préserver les villes et monuments historiques des actes de vandalismes et de dégradations naturelles, en coordination et en coopération avec les différentes autorités compétentes.
• Préparer un guide contenant les spécifications et conditions relatives aux travaux de construction, de restauration, d’entretien, de reconstruction et de réhabilitation dans les sites inscrits et les villes historiques.
• Sortir du concept de la relation rentière avec les zones patrimoniales comme réserve immobilière pour le secteur de la construction.
• Adopter le système des zones patrimoniales spéciales et des réserves patrimoniales aux niveaux rural et urbain, et mettre à jour le système de construction, en fonction des conditions de la zone patrimoniale spéciale.
• Gérer et organiser la planification et la reconstruction (création de l’Observatoire urbain).
• Proposer la création d’un Observatoire urbain permanent au sein de l’Ordre des Ingénieurs et Architectes de Beyrouth, sous la supervision d’un comité consultatif issu des facultés d’architecture, des associations scientifiques d’architecture et des sociétés d’architecture partenaires de l’ordre même.

Recommandations générales :

• Fonder l’organisme organisateur soumis à la gestion du patrimoine urbain, en coordination avec les autorités et fonds nationaux internationaux pertinents et soutenir sa préservation et son développement. L’organisme, en coordination avec les autorités compétentes, élabore des plans pour le développement économique des sites enregistrés.
• Déterminer les domaines et les thèmes d’investissement et de sécurisation des financements, ainsi que le processus de partenariat entre les secteurs (public et privé).
• Mettre l’accent sur la nécessité de mettre en œuvre le plan et la vision globale de la gestion de la reconstruction de la ville de Beyrouth proposés dans la Déclaration urbaine de Beyrouth dans tous ses axes.
• Mettre l’accent sur la conception d’un processus permettant d’impliquer toutes les parties prenantes dans la prise de décision, conformément à l’intérêt public de la communauté et de la ville.
• Mettre l’accent sur la formation d’une administration centrale des parties prenantes et des financiers avec la participation d’un comité d’audit financier neutre pour superviser la reconstruction.
• Mettre l’accent sur la nécessité de mettre en place une administration professionnelle, spécialisée et transparente pour gérer le port de Beyrouth afin de lui redonner son rôle de premier plan au niveau de la Méditerranée.
• Créer un centre de formation et de gestion des catastrophes.
• Mettre l’accent sur la nécessité d’examiner les lois qui ont des effets négatifs sur l’intérêt public.

Universitaires et spécialistes participant à la discussion et à la préparation de la Déclaration urbaine de Beyrouth.